Un soir d'avril 1992, une chose extraordinaire se produisit. Dans le secret le plus total, quelques artistes issus du rock'n roll, de la peinture, du théâtre de rue, de la mécanique, de la cuisine mais aussi du conservatoire, décidèrent de mêler leurs savoirs pour proposer au monde des spectacles de qualité. Ce qui fut mis en chantier le soir-même. Après quelques heures de discussions fort intéressantes sur le rôle de l'art dans la société et sur l'histoire de l'art en général, ils se mirent au travail sans ménagement.
Il fallut d'abord trouver un nom pour cette drôle de bande. Ce fut "Les Barbarins Fourchus" en hommage à B. Vian. Certains écrivirent des textes, d'autres s'occupèrent des décors, d'autres encore de la musique et pendant que toutes et tous buvaient l'apéro, un repas mijotait à feu doux sur la cuisinière Emmaüs. Après le vol d'un chariot de super marché habilement habillé en transport de matériel et après avoir récupéré des costumes (posthumes) chez les premières personnes qui avaient soutenu leur travail (La Tronche accueil), ils procédèrent à une mémorable répétition générale pendant laquelle ils découvrirent ébahis ce que pouvait être le travail collectif... Le lendemain ils parcouraient la ville à pied afin d'offrir au public le fruit de leurs recherches artistiques. Sur la place centrale de la cité ils eurent droit à leur première standing ovation ainsi qu'à une manche non négligeable qui leur permit dès le jour suivant de faire l'acquisition d'instruments de musique d'occasion chez Emmaüs.
Un de leurs premiers fans leur offrit même 100 francs pour aller jouer plus loin ! Ce qu'ils acceptèrent avec fierté sachant que « seules peuvent être récupérées les œuvres récupérables ». Voilà d'où viennent les Barbarins Fourchus. La suite c'est treize années d'aventures faites de créations, de rencontres, de voyages, de concerts dans les bars, les écoles, la rue, les prisons - de spectacles en salle, sous chapiteaux, dans des voitures, des avions - de réalisations de films, de CD autoproduits d'occupations actives de divers espaces (Le Halage, Beauregard et le Théâtre 145 depuis 1999)... ..."La suite, c'est chercher encore, être en quête de mots, de sons, de musiques poignantes, d'une justesse, d'une lumière vibrante et d'un mouvement simple. Marcher encore sur ce fil de doute qui est peut-être le moteur de tout cela, tiraillés par la pesanteur, entre une possible chute et un réel équilibre. Peut-être trouver ne serait-ce que pour un instant jubilatoire, dans un éclair, cette sorte de fragile alchimie contenue dans nos sens, à notre place d'humain - ici et loin."Delfino.